15/06/2025
Kinshasa - Rdc
Politique

 RDC : Félix Tshisekedi pour une reforme au parlement [ Tribune de Léon ENGULU III ]

Les électeurs congolais sont profondément préoccupés par une pratique parlementaire qui voit les nouveaux élus céder délibérément leur siège à leurs suppléants dès le début de la session pour briguer des postes ministériels ou de mandataires. Cette pratique est d’autant plus inquiétante que ces suppléants sont fréquemment des membres de famille, femme, enfant ou neveux sans parcours significatif. Une loi contre la suppléance népotiste, la règlementation de la cession des sièges et le dépôt de candidatures multiples devrait être adoptée pour mettre fin à cette pratique néfaste pour la démocratie.

Violation de la volonté populaire

Les cessions népotistes des sièges parlementaires et les dépôts de candidatures multiples qui les préparent constituent un détournement du suffrage universel et une trahison du mandat électif car les électeurs votent pour un individu particulier, en fondant leurs jugements sur son programme, sa personnalité et ses promesses de campagne. Céder immédiatement ce mandat à un suppléant, le plus souvent membre de famille, revient à trahir la confiance des électeurs et à mépriser la signification de leur vote. Le parlementaire élu utilise le suffrage comme un tremplin vers un autre poste, sans avoir l’intention d’exercer réellement la fonction pour laquelle il a été choisi.

La suppléance népotiste préparée d’avance viole le choix des électeurs car ils n’ont pas choisi le suppléant comme leur représentant principal. Imposer un suppléant dès le départ pour des raisons opportunistes prive les citoyens du représentant qu’ils ont légitimement élu, plaçant leur circonscription sous la tutelle d’une personne qu’ils n’ont pas nécessairement approuvée. Des règles de suppléances devraient être établies pour éviter que le népotisme et le clientélisme agissent au détriment de la compétence.

Du favoritisme familial

 Le remplacement de l’élu principal par des membres de famille, souvent sans expérience ou qualifications reconnues pour le rôle de législateur, constitue un népotisme flagrant. Les sièges au sein de l’organe législatif deviennent des héritages ou des récompenses familiales, au lieu d’être occupés par des individus compétents et méritants, capables de contribuer efficacement au travail parlementaire. Cette pratique affaibli la qualité de la représentation nationale et révèle un parlement composé en partie de personnes cooptées par des liens familiaux plutôt que par leurs compétences et leur engagement citoyen. 

Par le fait de cette pratique le parlement congolais est peu efficace dans l’élaboration des lois et se distingue par des bavardages médiatiques incessants, des invectives publiques, des menaces institutionnalisées et des palabres procédurières,au détriment du contrôle de l’action gouvernementale et la défense des intérêts du peuple. 

Les Congolais ont observé une instrumentalisation des sièges parlementaires qui deviennent une simple monnaie d’échange pour obtenir des positions plus lucratives ou influentes au sein de l’exécutif ou d’autres institutions. Cela dévalorise la fonction de député et réduit le Parlement à un simple marchepied politique. Ces pratiques préméditées sont la cause d’un manque de continuité parlementaire car les suppléants doivent s’adapter rapidement, sans avoir nécessairement participé à la dynamique électorale ou à la formation des coalitions initiales. 

Ces arrangements sont perçus comme des combines politiques opaques, où les intérêts personnels et familiaux priment sur l’intérêt public. Le manque de transparence autour de ces substitutions prématurées érode la confiance des citoyens envers leurs institutions et leurs représentants. Ce détournement électoral sur des bases népotiques décourage l’engagement civique et la participation démocratique. 

Cette pratique consistant à céder systématiquement son siège de parlementaire à un suppléant, souvent un membre de famille sans qualifications évidentes, pour briguer d’autres postes, est une dérive antidémocratique qui mine la légitimité du processus électoral, favorise le népotisme et le clientélisme, introduit de l’instabilité institutionnelle et porte atteinte à l’éthique et à la bonne gouvernance. Le Président Félix Tshisekedi est appelé à dénoncer et à combattre cette pratique afin de préserver l’intégrité de la représentation nationale et de renforcer les fondements de la démocratie en RDC. Les Congolais exigent que les sièges au Parlement soient occupés par des individus choisis par le peuple et compétents pour exercer leurs fonctions. Ils exigent que leur indisponibilité soit strictement encadrée par la loi et que la suppléance familiale soit rigoureusement interdite. 

Des atteintes à la démocratie. 

L’absence d’encadrement légal de la suppléance conduit à la dilution du suffrage direct. En votant pour un candidat titulaire, les électeurs expriment une volonté claire envers une personne spécifique pour les représenter. Un recours trop fréquent aux suppléants signifie que des individus n’ayant pas directement obtenu la confiance du peuple se retrouvent à exercer des fonctions législatives importantes. Cela affaiblit la responsabilité de l’élu devant ses électeurs.

L’absence d’encadrement de la suppléance entraine une perte de légitimité car un député suppléant, bien que légalement investi, ne jouit pas de la même légitimité populaire que le titulaire. Son mandat découle indirectement du vote accordé à un autre. Un grand nombre de suppléants au sein des assemblées parlementaires érode la légitimité de l’institution.Le remplacement fréquent de titulaires par des suppléants introduit de l’instabilité au sein des groupes parlementaires et peut modifier les équilibres politiques issus des élections. 

De plus, en subissant des influences extérieures les suppléants perdent généralement leur autonomie de conscience et la liberté de vote des représentants du peuple. Leur responsabilité est diluée car c’est le député titulaire qui est directement responsable devant ses électeurs et doit rendre compte de son mandat. Le caractère exceptionnel de la suppléance parlementaire doit être préservé, le remplacement d’un député titulaire doit rester une exception motivée par des circonstances légitimes et clairement définies, telles que le décès, la démission volontaire, l’incapacité permanente ou l’acceptation de fonctions incompatibles, mais cela sans préméditation ni calcul politique antérieur. 

Une réforme s’impose, appel à la CENI

A la suite des élections de 2023, quelques 47 suppléants ont été appelés à siéger au Parlement. Une enquête approfondie devrait déterminer leurs liens de parenté avec les élus titulaires. Un réforme de la loi électorale s’avère nécessaire pour limiter le nombre de suppléant à 1 pour l’Assemblée nationale et à aucun pour le Sénat, suivant l’exemple du modèle type français du régime semi-présidentiel. En cas de vacance sénatoriale une élection partielle serait organisée pour pourvoir le siège vacant. Comparativement à la RD Congo, la France compte plus de parlementaires, mais plus de deux fois moins de suppléants, en raison d’un découpage territorial plus poussé incluant l’Outremer, soit 925 contre 609 en RD Congo. La loi électorale congolaise entraine que 1000 suppléants pour l’Assemblée nationale et 216 pour le Sénat sont repris sur les listes électorales. 

Cette réforme allègera le travail de la CENI, favorisera la lisibilité des urnes et réduira sensiblement le népotisme parlementaire. De plus la CENI devrait saisir l’opportunité pour rationaliser les coûts électoraux par la réduction du nombre de bulletin de vote, la réduction des frais de traitement administratif et des dépenses de campagnes. La réduction à 1 suppléant diminuerait drastiquement les coûts logistiques et la suppression des suppléants au Sénat réduirait d’autant les dépenses associées.

Au plan des enjeux électoraux, cette réforme limiterait les candidatures motivées par des accords tribaux ou familiaux et assurerait la simplification du processus électoral. Un seul suppléant pour l’Assemblée nationale permettrait une meilleure expression du choix des électeurs, réduirait les contestations sur la hiérarchie des remplaçants et favoriserait une meilleure responsabilisation des candidats. La réduction à 1 suppléant pour l’assemblée nationale et à aucun pour le Sénat se justifie par le principe que tout mandat doit être renouvelé par le vote populaire. Les sénatoriales partielles consolideraient le lien entre le sénateur et les députés provinciaux qui le choisissent, en évitant les successions automatiques perçues comme des arrangements claniques ou familiaux. Pour l’Assemblée nationale, la suppression du deuxième suppléant limiterait les alliances de convenance en rendant les candidatures plus sérieuses, avec le choix assuré de profils parlementaires convaincants.

Par ces réformes que seul pourra mener le Président Félix Tshisekedi, le principe « un mandat, un représentant » rendra effectivement la suppléance exceptionnelle. Cette réforme permettra des économies budgétaires, une lutte sans merci contre le clientélisme politique et le népotisme, renforcera la transparence électorale et la légitimité des élus et alignera les pratiques électorales de la RD Congo avec les standards internationaux. Le Président Félix Tshisekedi saura impulser cette réforme avec une révision prochaine de la loi électorale prévoyant des mécanismes d’organisation rapide des élections partielles. 

Rétablir la préséance politique conforme au régime

Enfin, face au brouhaha parlementaire propre à notre Assemblée nationale, qui se permet de lancer des invectives publiques à la Cour constitutionnelle en violation de la séparation des pouvoirs, le Président Félix Tshisekedi est appelé à rétablir la préséance politique institutionnelle conforme au régime semi-présidentiel. Cette préséance exige que l’exécutif passe avant le législatif dans l’ordre de gouvernance traditionnel Président de la République, Premier ministre, Président du Sénat et Président de l’Assemblée nationale. 

Le bicéphalisme exécutif, dont seuls les animateurs sont justiciables devant la Cour constitutionnelle, confie au Premier ministre la conduite de la politique de la nation comme chef de la majorité parlementaire. A ces titres, il ne peut être désolidarisé du Président de la République dans l’ordre de préséance de l’Etat. De ce fait le Président Félix Tshisekedi devra veiller à ce que le Gouvernement participe désormais à la fixation de l’agenda parlementaire afin de pouvoir voter de manière prévisible ses engagements électoraux, suivant le modèle type français. La troisième place du Présidant du Sénat dans la préséance politique du régime semi-présidentiel se justifie par le fait de son intérim potentiel à la présidence de la République. Ce rééquilibrage permettra d’éviter que l’Assemblée nationale n’agisse davantage en électron institutionnel libre, ce qui est manifestement le cas actuellement. Le Parlement n’a pas d’autre mission que celle d’accompagner de manière éclairée la réalisation du programme de gouvernance de Félix Tshisekedi, élu au suffrage universel direct, et mis en œuvre par son Premier ministre Judith Suminwa.

Léon ENGULU III

Philosophe, 

Agronome,

Ancien Coordonnateur a.i. du 

Mécanisme National de Suivi, 

chargé de la préparation des réformes 

en RD Congo.

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